Les 24 et 25 août dernier se tenait notre 23ème Université Hommes-Entreprises sur le Pouvoir.
Avec l’équipe du CECA, nous avions des objectifs ambitieux, au nombre de 5 :
– S’interroger sur la relation média-Pouvoir
– On parle toujours des ressources limitées ; il existe pourtant des ressources illimitées : la connaissance
– Le pouvoir de l’Homme va-t-il jusqu’à l’immortalité ?
– Le pouvoir du management libéré
– Le pouvoir de changer sa vie.

Pouvoir et légitimité


La première surprise de cette Université est celle d’un chercheur et professeur de classes-prépa, Christian Monjou, qui a l’originalité de décrire le pouvoir à partir de tableaux de maître.
Devant les 440 personnes présentes, (660 inscrites sur 2 jours) public de connaisseurs attentif, il nous livre un de ses secrets : la symbolique des tableaux, en prenant appui sur la reine Elizabeth 1ère, au début et à la fin de son règne.

Un tableau de début de règne exprime la légitimité institutionnelle sur laquelle doit s’appuyer la reine, jeune et sans expérience, par opposition à une toile de maître de fin de pouvoir, où s’exprime la légitimité charismatique d’Elizabeth.


En réponse à une question sur sa proximité avec Emmanuel Macron (qui a été son élève), il décrypte pour nous la symbolique des objets de la photo officielle du nouveau Président.


C’est ensuite au tour du philosophe Raphaël Enthoven d’intervenir sur le mot pouvoir : pouvoir, c’est avoir le droit, mais pas forcément les capacités : vous avez le pouvoir (le droit) de courir le 100 mètres en moins de 10 sec, mais seul Usain Bolt l’a réussi lors de son record du monde.

 

 

Média et Pouvoir

 

 

 

Pour Patrick Poivre d’Arvor, les média ont un certain pouvoir, mais pas à la hauteur de ce que pensent les décideurs présents dans la salle :
– En aucun cas, un journaliste ne suivra les injonctions de l’actionnaire de la chaîne ou du média dans lequel il travaille ;
– Les média ont une relative indépendance par rapport au pouvoir, par rapport aux débuts de la télévision : n’oublions-pas qu’il y a moins de 50 ans, l’état était propriétaire de l’ensemble des télévisions (les 3 uniques chaînes nationales) et les présidents successifs (de Gaulle, Pompidou et dans une moindre mesure Giscard) dictaient la ligne éditoriale aux chaînes…
– L’indépendance du journaliste est encore possible, si elle fait partie de ses valeurs.
– Oui, les média ont joué un rôle important dans la dernière campagne présidentielle, mais plutôt comme caisse de résonance.

 

 

 

Biomimétisme et pouvoir de la connaissance

La 2ème surprise de cette université est l’intervention du spécialiste du biomimétisme et de l’économie de la connaissance, Idriss Aberkane : avec une grande aisance, il développe ses 2 thèmes de prédilection.
Au lieu de continuer à piller la nature, imitons-là ! ainsi de la moule, très appréciée des amateurs de gastronomie, mais dont la colle naturelle est 100 000 fois plus efficace que la meilleure des colles industrielles, résiste à l’eau et au soleil et en plus, est bio !
Les connaissances rafraîchissantes de notre conférencier ne s’arrêtent pas là :
A cette assemblée majoritairement du sud ouest, et consciente de la richesse de son industrie aéronautique/spatial/défense, il rappelle que la Défense est à l’origine d’un grand nombre d’inventions, à commencer par internet.

Transhumanisme.

Le pouvoir de l’Homme va-t-il jusqu’à le rendre immortel ?
Même s’il s’en défend, le médecin-entrepreneur Laurent Alexandre semble prêt à l’envisager, tellement il croit au pouvoir grandissant de l’intelligence artificielle et à sa suprématie programmée sur l’Homme.
Dans une courte vidéo de 20 minutes, il alerte les décideurs sur ce nouveau pouvoir, dont les candidats à l’élection présidentielle n’ont quasiment pas parlé, et qui se prépare à bouleverser complètement des pans entiers de notre économie.
Actuellement, dit-il, le diagnostic de l’intelligence artificielle est beaucoup plus fiable que celui des 5 meilleurs cardiologues américains pour détecter certaines maladies…
Il enjoint l’Education Nationale à former des jeunes qui pourront travailler avec l’I.A., pas sur des métiers qui seront facilement surpassés et enjoint l’Europe à s’unir dans la recherche sur l’I.A. pour faire face à l’hégémonie américaine des GAFA.


Fabrice Hadjadj avait la difficile mission de répondre au tableau – assez clivant mais d’une grande clarté- posé par Laurent Alexandre.
Il commence par approuver le diagnostic : les nécessités d’hier deviennent option : on peut préférer le bébé-éprouvette, l’implant cérébral pour devenir plus intelligent,…
Il apprécie, comme tout un chacun, les avantages des objets connectés, mais fixe les limites du transhumanisme : « soigner l’humain est un progrès, l’augmenter est un moyen de sortir de la condition humaine ».
Le transhumanisme est le stade suprême du capitalisme financier : « on vous échange votre bras contre une prothèse, qu’il s’agit d’acheter très cher et de remplacer sans cesse, chaque année, par une autre prothèse, plus performante, puisque l’innovation vous condamne à l’obsolescence. »

Management libéré

Très attendu et clôturant ces 2 journées intenses de partage et de réflexion, le très médiatique entraîneur de l’équipe de France de handball, Claude Onesta, s’exprime sur le pouvoir d’un management libéré.
Il part d’un principe simple, celui de la responsabilité : « si je me contente d’obéir, je ne suis responsable de rien ! ».
« le premier élément que tu dois à tes coéquipiers, c’est ta performance ».
Les passerelles sont évidemment aisées avec le monde de l’entreprise, qui est celui de l’assistance.
Et venant d’un homme qui a gagné la quasi-totalité des dernières compétitions internationales les plus recherchées (J.O., championnats du monde et d’Europe), la parole fait autorité.
Sur la force du projet commun : « quelqu’un qui a participé à construire le projet commun, ne pourra fuir ».
Sur la force du collectif : « la véritable réussite, c’est de faire des choses plus grandes à plusieurs »
« la dimension du collectif est indispensable pour réussir un projet commun ».

Pouvoir de changer sa vie.

3 héros des temps modernes ont incarné ce pouvoir de changer de vie.
Claire Ly, avec beaucoup de retenue, nous raconte les 4 années d’épreuves terribles qui ont marqué ses 4 années de captivité dans les camps Khmers Rouges.
Son récit peut-être perçu comme une leçon de vie : il est toujours possible de trouver une issue à une situation désespérée.
En 1975, sa situation paraît insoutenable : enfermée dans un camp où la vie n’a plus aucune valeur, mari, père et frères fusillés, elle va mettre au monde un fils qui sera, pour elle, une revanche sur la mort et sur un monde absurde.
Au cœur de la violence absolue, me revenaient comme des flashs de lumière les instants de bonheur, de douceur et de tendresse que j’avais connus. Comme autant d’étoiles d’espérance qui m’ont aidée à rester humaine, raconte-t-elle.


Ladji Diallo, jeune des cités, semble enfermé dans un cercle de violence et de haine, qu’il ne peut contrôler ; un jour, ne supportant pas les remarques de son professeur de basket, il l’envoie à l’hôpital…
La découverte des Pyrénées et du Père Joseph va changer sa vie et le transformer en « caïd de l’amour ».
Il nous interprète 3 des chansons de son répertoire avant de nous livrer un témoignage poignant.

Aujourd’hui, il est chanteur, conteur et musicien et talentueux dans  ces 3 domaines.


Chékéba Hachémi nous fait revivre ses années de petite fille afghane, dans un pays encore occupé par les Soviétiques.
Avec elle, nous revivons les 15 jours de marche pour atteindre la Passe de Khyder vers le Pakistan et les menaces du passeur de la vendre au 1er village traversé.
Son engagement auprès d’Afghanistan libre, une ONG qu’elle a créée pour aider les femmes afghanes, son courage pour rejoindre le commandant Massoud et l’aider dans la reconstruction de son pays.

Ces 2 journées ont donc été riches de réflexions, de récits, d’échanges, d’émotion et d’intelligence.
Elles ont été une fenêtre sur l’autre, sur d’autres cultures, d’autres points de vue, probablement bien loin de l’idée habituelle que l’on peut se faire quand on évoque le mot « Pouvoir ».

crédit photos: Jean-Marie Laugery

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