Grâce à des amis, j’ai pu voir le dernier film de Jacques Perrin, Océans, le 4 Janvier dernier.
Jacques Perrin fait pour moi partie de ces artistes exceptionnels qui, tels Alain Delon pour le cinéma, Johnny pour le rock, Béjart pour la danse, ou encore Bocuse pour la cuisine, marquent de leur empreinte toute une vie, et rayonnent sur plusieurs générations.
Enfant, je m’angoissais pour le sort du sous-lieutenant Torrens/Perrin, poursuivi par les Viets dans la 317ème section ;
L’enquête du journaliste (interprété par Jacques Perrin) sur l’assassinat du leader de gauche (joué par Yves Montand) durant la dictature des colonels dans le film engagé : « Z » réalisé par Costa-Gavras, me passionnait.
Costa – Gavras n’arrivant pas à trouver de distributeur, c’est Jacques Perrin qui a produit ce film mythique à 27 ans ( !), malgré une opposition farouche du ministre de l’Intérieur de l’époque, Couve de Murville .
Adulte, je découvrais le monde de l’infiniment petit grâce à Microcosmos (César du meilleur producteur pour Jacques Perrin), puis des oiseaux migrateurs dans le fabuleuxAdolescent, je participais à l’aventure du Crabe Tambour/Perrin durant les guerres coloniales.
« Peuple Migrateur » et enfin, « Océans ».
Observateur et acteur de la vie économique, je fais partie de ceux qui, parfois, se lamentent sur le manque de courage ou de vision de nombreux politiques, sur la mondialisation, sur les petites et grandes faiblesses de notre société.
Jacques Perrin, répondant un jour à son interlocuteur qui se lamentait sur « le système » répondit : « le premier des systèmes, c’est soi-même ».
L’acteur-réalisateur-producteur Jacques Perrin est ainsi pour moi la preuve que la passion, le travail, l’idéal, la créativité sont des moteurs extrêmement puissants pour réussir et dépasser ses limites.
Et Jacques Perrin a l’air de passer sa vie à dépasser les frontières du possible : conservatoire à 15 ans, acteur à 19, producteur à 27, il dirigeait déjà à cet âge 400 figurants à Alger, discutant d’égal à égal avec le préfet de police !
Allez vite voir Océans, si vous ne l’avez fait, vous découvrirez, outre de superbes images sur le « peuple des océans », comment un homme peut déplacer des montagnes.
Pour Océans, il passé son temps, avec Jacques Cluzaud, à imaginer les moyens et apporter les réponses techniques qui n’existaient pas, comme par exemple de construire une torpille permettant de filmer les dauphins à 35 km/h sous l’eau ou encore de mettre au point une caméra gyrostabilisée au bout d’un bas de grue sur un Zodiac de façon à pouvoir filmer des plans stables.
La prouesse est également dans la relation humaine : ce projet extrêmement complexe a nécessité pas moins de 14 équipes de tournages, 400 personnes en tout, comportant des spécialistes océanographes, plongeurs, scientifiques de haut niveau et bien sûr les spécialistes du cinéma.
A ce niveau là, rapporte Jacques Perrrin*, « on ne peut pas réaliser un tel projet si nous ne sommes pas tous solidaires »… « et les choses se font par la suggestion : pour que ça marche, on ne peut pas se disperser dans des controverses ».
On dit que pour convaincre les banquiers de le suivre, Jacques Perrin leur dit : «on va bâtir des rêves».
Cher Jacques Perrin, continuez à nous offrir de beaux rêves comme ceux-là !
* dans: L’Entreprise.com du 5 janvier 2010