Par Alix Sokambi
Claire Oppert a été pour moi une grande et joyeuse découverte. N’ayant pas encore entendu parler de son travail fabuleux, je me suis tout d’abord plongée avec curiosité dans son histoire et son parcours, puis avec délice et joie dans sa personnalité gracieuse et subtile.
Madame Oppert, en talentueuse violoncelliste, bouleverse les âmes, les lient les unes les autres et surligne l’importance de la vie par le chant de son violoncelle, » Le pansement Schubert », comme l’appelle spontanément une infirmière d’un EHPAD parisien dans lequel est intervenue Claire pour apaiser une dame souffrante . Elle y avait joué l’op.100 de Schubert pour calmer la démence de cette patiente.
Remarquant que le chant de l’instrument apaise radicalement cette patiente en l’espace d’une ou deux mesures, Claire (née d’une famille de médecins et de musiciens) décide de mener des études scientifiques autour de ce magnifique phénomène, dans le but de comprendre et de faire vivre un nouveau processus d’apaisement et de vie pour les patients souffrants et/ou déments.
Ses interventions « musico-médicales » ou « musico-thérapeutiques » s’articuleront alors autour d’EHPAD, de services de soins palliatifs et de centres pour grands autistes.
Claire note soigneusement ses études cliniques, observations et résultats avec l’aide de scientifiques et autres contributeurs volontaires.
Son livre « Le pansement Schubert » est alors édité. Elle y raconte aussi ses perceptions, appréhensions et joies. On l’y voit grandir, ouvrir ses yeux et s’émouvoir de l’humanité profonde ainsi que des éclairs de lucidité passagers de chacun de ses patients.
Finalement, on en vient presque à se demander à qui le pansement Schubert s’adresse vraiment : au patient ou au soignant? A la famille ou à Claire Oppert?
Après avoir lu son livre, je crois avoir compris qu’il s’adresse à tous, que son pouvoir est plus fort que l’on ne peut l’imaginer.
Claire évoque une étude clinique sur l’impact positif de la musique sur les malades en fin de vie, sur les patients atteints d’Alzheimer et sur les soignants, les familles. Elle nous parle d’une étude sur le souffle de ces patients dans le coma ou très souffrants, qui montre une amélioration de l’état du patient dans 85% des cas, grâce au « chant » de son instrument, faisant alors clairement entendre la vie du patient à la famille qui l’entoure. Quel message éthique et grand ! La vie est présente même quand parfois on ne la voit plus vraiment… La vie est importante et si elle est souffrance, on peut la soulager plutôt que l’éradiquer.
Au fait, quelle musique utilise-t ‘elle pour parler aux patients ? Il y a beaucoup de classique comme Mozart, Schubert ou Beethoven, mais aussi du Piaf, du Cloclo, du Tango, du Gospel ou du rock, le répertoire est très varié!
Elle qualifie son travail d’une « aventure extraordinaire d’un violoncelle qui sort des salles de concert pour un temps, et qui va rentrer dans les lieux de soins. […] L’instrument vient rejoindre le corps malade, le fait vibrer et semble rejoindre une part non malade de la personne aux dernières heures de sa vie » explique mystérieusement Claire .
Après 112 pansements Schubert, la conclusion se fait entendre: la présence de cette musique dans les chambres diminue l’anxiété et la douleur de 10 à 50 % en complément de la morphine . C’est une démarche aussi incroyable qu’utile !
Auprès des grands autistes, Claire intervient dans un but précis évoqué par Howard Buten : » A nous, les autres, de mériter l’attention des autistes et de nous rendre suffisamment intéressants pour eux, de nous mettre à leur hauteur ». La démarche est alors riche de sens et de grandeur des deux côtés!
En tant qu’ancienne auxiliaire de vie, je ne peux que m’émerveiller devant la beauté de tout ce travail. Ayant été spécialisée auprès de personnes âgées atteintes, pour la plupart, de pathologies démentielles ou physiquement souffrantes, j’aurais aimé connaître ce moyen d’apaisement, j’aurais aimé les faire vibrer de joie à l’écoute de mon instrument ou de ma voix, afin de les soulager un court instant chaque jour.
Ce métier difficile et ingrat d’accompagner des personnes malade, souffrantes, en démence ou en fin de vie, a été pour moi la plus importante étape de ma vie professionnelle car chacune de mes patientes m’a permis de grandir en offrant ma force et ma personnalité à leur service.
Je comprends donc le manque de mots que peut avoir Claire face à la grandeur d’une vie changée par la musique, face aux larmes d’une personne qui respire du Schubert, face à la gaité de celle où celui qui dansera sur du Piaf le temps d’un morceau au cœur de ses fardeaux.
J’ai vu que la mort n’est pas que physique, j’ai senti qu’elle a des dimensions que l’âme ne peut parfois pas saisir complètement. J’ai compris aussi que la mort est mystérieuse et fait partie intégrante de la vie, et qu’il est essentiel de l’accepter pour accompagner. Claire le confirme lors d’une intervention en disant » Nous ne maîtrisons pas la mort, mais nous pouvons être à ses côtés et croire que la vie existe jusqu’au bout » .
Je crois fermement que la vie est faite de petites et grandes morts intérieures ou extérieures, et d’ailleurs Marinette, une de mes patientes, me le répétait sans cesse. C’était ma patiente la plus sereine et joyeuse.
Alors merci Claire Oppert pour le sens que vous donnez à votre travail, merci pour la vie que vous en faites jaillir et pour la joie que vous m’avez offerte sans le savoir.
J’ai hâte de vous entendre et, peut-être, de vous rencontrer lors de l’Université Hommes-Entreprises organisée par le CECA les 24 et 25 août!
Alix Sokambi (future alternante au CECA !)
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