L’époque de la pré-rentrée étant aussi celle des Universités, à peine sorti de notre Université Hommes-Entreprises, je filais à Jouy-en-Josas assister à l’Université du MEDEF, un must en la matière…
Laurence Parisot et les caciques du MEDEF souhaitant une Université « utile », avaient donc prévu que les 3 jours de débats seraient autant de pistes de réflexion alimentant le « B20 » (B : pour business, B20 comme pendant au G20 qui se tiendra en fin d’année).
Plutôt que d’explorer les différentes tables rondes, concentrons-nous sur quelques pépites, glanées au cours de certains des débats ou plénières de cette Université particulièrement réussie, comme la conférence-débat sur l’émotion.
Parler du droit à l’émotion lors d’un colloque organisé par le plus gros syndicat patronal, voilà qui méritait que l’on s’y attarda…
Dans la salle : 300 à 350 chefs d’entreprise, dont de nombreuses femmes (le sujet n’y est pas pour rien…)
A la tribune : une belle brochette de penseurs, philosophes, médecins, chefs d’entreprise et personnalités politiques : depuis Marcel Rufo, la psychiatre Marie-France Hirigoyen, jusqu’au PDG de France Télécom, Stéphane Richard, en passant par le ministre de la culture Frédéric Mitterand.
Stéphane Richard, puis Michèle Alliot-Marie, spécialement détendue, semblent, par leurs réponses, justifier ce choix du Medef : l’entreprise ne peut bannir l’émotion, elle doit l’accepter et l’accueillir…
L’émotion est devenue obligatoire : un Politique va paraître sensible s’il pleure et en même temps il faut qu’il puisse surmonter ses émotions : la partager, oui, être submergé par elles, non…
Le docteur Philippe Rodet, médecin spécialiste du stress y répond :
On rend les émotions positives en encourageant les salariés de l’entreprise. Cela diminue en effet les risques psychiques de 32% chez les hommes et de 40% chez les femmes ; de plus, on améliore le sentiment positif personnel : la persévérance, le goût du challenge et donc de la réussite.
Philippe Rodet raconte l’histoire de cette enfant vietnamienne de 9 ans, « Kim Phuc », grièvement brûlée, courant pieds nus sur une route enflammée par le napalm déversé par des B52 : un cliché saisi par un photographe de l’époque avait d’ailleurs fait le tour du monde…
http://www.lalumieredumonde.fr/2018/07/phan-th-kim-phuc-l-enfant-de-cette-fameuse-photo-a-donne-sa-vie-a-christ-ces-bombes-m-ont-conduite-a-christ.html
Quelques années plus tard, cette jeune fille témoigne à une réunion d’anciens combattants du Vietnam : si l’équipage du bombardier qui a déversé du napalm au-dessus de mon village est là, sachez que je lui pardonne, s’il s’engage pour construire la paix…
A la fin de la réunion, un homme se présente à Kim Phuc ; lui déclarant qu’il pilotait ce B52, il lui demande si elle accepte de lui pardonner… elle lui répond par l’affirmative, pour peu qu’ils s’engagent, ensemble, à construire la paix…
A Stéphane Richard, à qui l’on demandait comment tirer partie de l’émotion et rendre l’entreprise meilleure, il répond par 3 convictions :
Enfin, il constate que, dans l’entreprise, de nombreux problèmes viennent de la relation managériale et en particulier de l’écoute et du respect de l’autre : cela nécessite de l’accompagnement et de la formation.
On peut regretter que l’entreprise soit souvent perçue comme une organisation uniquement faite pour faire du profit : et s’il est vrai que ce monde est parfois dur et sans pitié, à travers ce débat, nourri par autant de personnalités différentes, on s’aperçoit que l’entreprise change et se pose aujourd’hui les vraies questions : sens, écoute, accueil…
C’est sans doute la raison pour laquelle le magazine Psychologies, représenté ici par son Président, annonce qu’il lance un appel aux entreprises, dans son prochain numéro, pour plus de bienveillance…
Tout un programme, qui a des chances de réussir, si l’on commence d’abord par y croîre…