Retrouver la confiance…

 

(Mercredi 26 août)

C’est par un soleil radieux que les premiers inscrits à la 15ème Université Hommes-Entreprises se présentent aux portes du château Smith Haut Lafitte. Après un mot d’accueil sympathique de Luc Dirickx, Vice-Président du CECA, Christophe de La Chaise présente le programme de ces 2 journées devant une salle comble. Le fait que 450 décideurs de tous horizons aient répondu présents est un signe de l’aspiration de beaucoup de cadres et de dirigeants de renforcer la dimension humaine dans le travail. En écho à ce constat, de belles images des éditions précédentes rappellent la vocation de ces Universités: rappeler l’importance de remettre l’Homme au cœur de l’entreprise.

Dès la fin du film, Vianney, 9 ans, s’avance au micro et réussi à nous faire partager le premier moment d’émotion de cette 15ème édition en lisant le très beau texte de Mannick :


« Je connais des bateaux qui restent dans le port,
De peur que les courants les entraînent trop fort
Je connais des bateaux qui rouillent dans le port
A ne jamais risquer une voile au dehors »

 

L’émotionnel, c’est justement le registre de prédilection d’un grand spécialiste, psychiatre à l’hôpital Saint-Anne à Paris et auteur de nombreux best-sellers, Christophe André. Avec brio, humour et humilité, Christophe André montre en quoi la confiance en soi est un facteur important d’équilibre individuel et collectif, qui joue un rôle certain dans la réussite des entrepreneurs et qui doit nous inciter à nous engager de manière active. Il souligne également l’importance d’accepter d’échouer de manière occasionnelle, associant ainsi confiance et humilité.

En illustrant son propos d’exemples de psychologie sociale facilement compréhensible par tous, il a ainsi offert une perspective différente sur les questions managériales dans l’entreprise, qui a rencontré un vif succès auprès du public.

 

De la confiance, il en aura fallut beaucoup à cet ancien enfant abandonné et battu, devenu par la suite chef de bande à 13 ans, pour retrouver des chemins d’espérance et devenir ce qu’il est aujourd’hui : un porteur d’espoir pour des milliers de personnes. Une juge pour enfant, un clochard érudit, un enfant handicapé – qui passe 2 jours pour lui écrire 3 lignes d’amitié – un prêtre (le co-fondateur avec Jean Vanier de l’Arche) le réconcilient avec le genre humain.

Cette histoire, Tim Guénard la raconte dans le best-seller « Plus fort que la haine ».

Son témoignage d’une très grande force sur la capacité de l’homme à s’en sortir et à se construire avec le soutien et la confiance d’autrui est accueilli avec émotion par le public de l’Université.

Pouvions-nous rêver mieux qu’une surdouée de l’alpinisme pour illustrer la confiance en soi ou en son co-équipier ?

Ceux d’entre-nous qui se sont déjà aventurés sur les sommets enneigés des Pyrénées ou du Mont-Blanc connaissent l’importance de cet équipement vital : la corde et le guide qui la tient…

Plusieurs fois championne du monde d’escalade, seule femme à conquérir la face nord de l’Eiger, le Cervin et les Grandes Jorasses, Catherine Destivelle a aussi conquis le public des dirigeants présents par la façon bien à elle de raconter les expéditions les plus incroyables avec un air de ne pas y toucher.

Décrivant ses différents défis avec de très nombreuses diapos et clips vidéo, elle a montré que la puissance de la vision associée à une préparation minutieuse était la clé de tous ses succès.

En s’entourant de nombreux spécialistes qui anticipent avec elle le déroulement de son ascension, Catherine prend le temps de calculer les risques qu’elle encoure, ce qui lui permet de gravir les sommets en toute confiance.

 

(Jeudi 27 août)

Pour cette deuxième journée d’Université, il faut presque repousser les murs de la Halle Candélys  pour accueillir les 300 participants venus assister à la brillante prestation de l’économiste Philippe Dessertine.

 

Professeur à Nanterre, directeur de l’Institut de Haute Finance, Philippe Dessertine a été un des seuls économistes à prévoir dès 2004 le séisme que nous connaissons.

Quelques heures seulement après le coup d’envoi de la Commission Rocard-Juppé à laquelle il appartient, l’économiste est revenu sur les causes de la crise financière : l’endettement pour l’immobilier aux Etats-Unis encouragé par les administrations Clinton et Bush et le dérèglement du système économique américain.

Revenant sur les différents plans de relance de l’automne dernier, il souligne le risque que prennent de nombreux états en créant autant de dette publique.

Affirmant que la mondialisation est en pleine crise d’adolescence, Philippe Dessertine pense que 3 facteurs doivent être réunis pour en sortir:

  • Une plus grande transparence du système international (en particulier de la Chine, future 2ème puissance économique mondiale)
  • Que les problèmes économiques puissent être traités au niveau d’une grande institution internationale, à l’image d’un FMI aux pouvoirs modifiés
  • Que les consommateurs changent leurs habitudes.

« Cette crise est peut-être la pire et la meilleure des choses pour nous faire comprendre que la mondialisation doit être adulte » : à chaque citoyen et entrepreneur de prendre les choses en main.

Les énergies renouvelables étant souvent considérées comme un des relais de croissance pour sortir de la crise, il était logique de faire appel à une spécialiste du développement durable pour intervenir également sur la confiance dans l’économie.

Dans 2030, le Krach écologique, Geneviève Ferone, directrice du développement durable de Veolia Environnement, nous garde de trop miser sur le développement technologique comme solution à la raréfaction des énergies fossiles…

Soulignant la convergence à l’échelle d’une génération (20 ans) de différents phénomènes (réchauffement climatique et utilisation des énergies fossiles, mais aussi augmentation sans précédent de la démographie, souhait de croissance pour tous), Geneviève Ferone affirme qu’il y a urgence à prendre les questions environnementales au sérieux.

En évoquant explicitement le mot éthique, Geneviève Ferone nous engage à nous responsabiliser sur un contrat social basé sur plus de sobriété et de solidarité.

Après un cocktail déjeunatoire sur les magnifiques pelouses de Smith Haut Lafitte et les bons vins des Pessac Léognan, il faut un peu de temps pour rassembler tout ce beau monde dans la Halle, pour un débat sur « retrouver la confiance en l’économie ».

Danielle Boespflug, éditrice d’Eric-Emmanuel Schmitt nous ayant annoncé un retard de 2 heures, Jean-Bernard Gilles, de Sud Ouest Eco, qui devait animer le débat en fin de matinée, a du nous quitter.

Celui-ci réunit, outre Philippe Dessertine, Alain Mainguy, directeur du CPA (Advanced Management MBA), Edgard Girard (directeur de l’Inseec Bordeaux et ancien banquier d’affaires) et Henry Quinson, ancien trader, fondateur d’une communauté monastique dans les quartiers nord de Marseille.

Les questions d’éthique, de transparence (et des paradis fiscaux) ont été largement abordées.

L’éthique est un des sujets de fond abordé au CPA depuis 7 ans et une valeur dans laquelle les étudiants de l’INSEEC se reconnaissent.

Edgard Girard propose de corriger l’asymétrie qui existe actuellement entre la possibilité de gains et les pertes pour les banquiers d’affaires.

Le patron de Lehmann, qui a gagné 500 millions de dollars au cours des 3 dernières années, aurait du être également redevable des pertes qu’il a causées.

Henry Quinson se demande comment on va créer des contre-pouvoirs ?

Pour retrouver confiance dans l’économie, il faut donc retrouver des règles éthiques dans la finance, partagées  par tous les pays et savoir responsabiliser chacun pour une conduite éthique des affaires.

Henry Quinson, notre conférencier suivant, re-situe le débat de la crise économique au regard des plus pauvres : avec la mondialisation, il y a aussi des questions beaucoup plus fondamentales qui se posent : par exemple, plus d’1 milliard d’habitants sur cette terre qui ne mangent pas à leur faim.

L’Homme au service de la finance

Henry Quinson, lors d’un stage de banquier aux Etats-Unis, se souvient que la matinée commençait par un tonitruant : « make money » à la question : « what is our goal ? »  (quel est votre but ? faire de l’argent)

Son père, lui-même ancien banquier américain, n’avait jamais entendu le même discours quelques 30 années auparavant…

C’est peut-être pour cette raison (et par vocation), qu’il quitte la banque et un travail très rémunérateur de trader pour créer une communauté monastique dans les quartiers nord de Marseille et vivre en accord avec ses valeurs auprès de population en difficulté.

 

Comme en 2008, maître Olivier Roquain se prête à l’exercice particulièrement difficile de la synthèse, rappelant les moments forts et les phases clés des intervenants successifs.

Il nous invite, comme l’a fait Henry Quinson, a ne pas choisir toujours plus, mais : mieux ; comme le proposait Geneviève Ferone dans la matinée, à s’impliquer personnellement pour le retour de plus d’humanité dans  l’entreprise et donc plus de confiance.

Pour finir, il cite un passage d’Oscar et la dame Rose, qui introduit parfaitement le dernier conférencier, Eric-Emmanuel Schmitt.

C’est finalement en fin d’après-midi, après quelques inquiétudes liées au TGV, que l’auteur du best-seller Oscar et la Dame Rose s’avance vers la tribune pour une magistrale leçon de philosophie sur la confiance.

Il s’interroge d’abord sur la perte de confiance et le pessimisme de la pensée philosophique contemporaine.

Selon lui, c’est parce que l’homme du 21ème siècle croit savoir qu’il est un être fini dans un univers infini et insaisissable, une fois la religion reléguée au rang de vague croyance mystique, que la confiance a disparu.

Aujourd’hui, il est trop souvent de bon ton d’être pessimiste et on est passé d’un abus de confiance à un abus de méfiance.

Pour Eric-Emmanuel Schmitt, l’homme doit faire le choix volontaire de la confiance, il doit choisir d’accueillir l’autre avec bienveillance.

« Je suis optimiste car c’est la seule chose cohérente que le tragique m’inspire ; je décide d’avoir confiance. Si le destin me prouve que j’ai raison, alors, j’aurais gagné. S’il me prouve que j’ai tort, je n’aurais rien perdu, mais j’aurais eu une vie plus heureuse et plus généreuse ».

Merci Eric-Emmanuel pour ce regain d’optimisme qui illumine cette 15ème Université.

 

 

 

Merci à tous les partenaires, entreprises, média, grandes écoles, associations professionnelles, grâce à qui cette édition a eu lieu et Rendez-vous à Smith Haut Lafitte les 25 et 26 août 2010 !
L’équipe du CECA
Rédaction: Amélie Aubert et Christophe de La Chaise

crédit photos: JM Laugery