Les premières décennies de la vie professionnelle d’Antoine Brochon sont un parcours en entreprise assez classique à la Poste, pour ne pas dire tranquille. Marié et père de trois jeunes filles, son existence est encore loin d’avoir atteint la singularité qui peut la définir aujourd’hui.
C’est au sortir des évènements funestes de novembre 2015 que sa vie commencera à prendre un virage à cent quatre-vingt degrés.
Considérant ses convictions personnelles trahies par la passivité gouvernementale qui suivit le drame du Bataclan, Antoine Brochon ne peut se résoudre à l’inaction.
Antoine aborde donc l’année 2016 avec une unique résolution en tête: partir se battre en Syrie face à l’État islamique, aux côtés des Kurdes. Il voit même ses ambitions soutenues par sa femme qui considère avec sang-froid que s’il voyait son destin futur s’écrire sous ces auspices, c’était là son devoir de citoyen.
Face aux difficultés rencontrées, il doit finalement renoncer à partir combattre. Ceci, pour mieux embrasser une cause humanitaire: il rejoint les rangs de l’ONG « SOS Chétiens d’Orient » et embarque en août 2016 pour le Moyen-Orient, en Syrie, où il passera trois mois.
L’équilibre de paix entre les religions est là-bas au bord du précipice, après une longue période de guerre : il faut agir. Mettant tout en oeuvre pour permettre aux populations chrétiennes autochtones de rester sur leurs terres d’origine, Antoine est envahi par une détermination profonde à aider cette communauté, qui a toujours été considérée comme médiatrice des conflits historiques inter-religieux.
Mieux encore, il mesure désormais pleinement l’efficacité de son aide par rapport à ce qu’aurait pu être un engagement armé : il a fait le bon choix, il en est convaincu.
Antoine Brochon participe à la reconstruction d’un village martyr, symbole malgré lui de la barbarie takifiste qui s’abat sur la Syrie.
Ses diverses missions le mèneront ensuite en Jordanie, avant d’arriver en Irak, en juin 2018. C’est à Bagdad que sa vie a failli se terminer. Antoine est pris en otage en pleine ville, avec deux autres humanitaires de son organisation et leur traducteur. C’est le plongeon dans les abysses. Ne sachant pas à qui ils ont affaire, les quatre otages croient leur dernière heure arrivée. Antoine et ses amis entament une période de séquestration, de faim, de peurs et de faux espoirs, savamment entretenus par leurs ravisseurs.
Les seules lueurs d’espoir seront pour Antoine sa conviction sans faille que la France, que ses proches, que ses collègues, ne les laisseront jamais tomber, ainsi que sa foi.
Le salut des détenus arrivera de façon inespérée, presque digne d’un scénario hollywoodien. L’apparition du virus Covid, à l’ampleur encore insoupçonnée à ce moment-là (nous sommes alors en mars 2020), affole les kidnappeurs qui redoutent les conséquences d’une mort d’un ou des otages. Cette mort annulerait leur valeur d’échange et pourrait entraîner des mesures de rétorsion de l’État français. De la manière la plus fortuite possible donc, Antoine Brochon et ses compagnons d’infortune sont libérés à quelques centaines de mètres de l’ambassade de France, à Bagdad, après 66 jours de séquestration.