Christophe, Merci pour ce résumé qui permet de se replonger dans le bain de jouvence de ces deux journées d’été. La messe est dite et, pourtant, je ne résiste pas à l’envie d’éclairer la scène du fond de la basse-cour et de la balustrade d’où je nous (cailloux !) observais. Une avalanche de mauvaises nouvelles (hic !). Si le message s’est vu (et bien entendu !) décliné à l’envie selon le cursus et le talent de chacun de tes brillants invités, j’en retiens trois accords majeurs qu’il me paraît bon d’égrainer ici comme le pratiquant son chapelet ! Une nuée de motifs convergeant vers nous (aïe !). Quelques nécessaires et suffisantes raisons d’espérer (ouf !). Tout ceci faisant écho au quantique – laïc – d’Eric Emmanuel Schmitt l’an passé. Reprenons tout cela, si tu veux bien, par le menu : C’est avec le sourire que Patrick Lemattre nous brosse un portrait aussi triste que réaliste du Français d’aujourd’hui à travers les âges, en somme toi moi nous. Chacun en prend, non pas pour son grade cette fois, mais pour son âge ! Des enfants rois du baby boom, dont les élites – devenues poussiéreuses et gâtées – jouissent et jouirent sans vergogne durant des décennies… De la génération des 40 – 60 ans, cocus de l’histoire, assaillis devant brisés par derrière, comme l’eut dit Jean Ferrat. Bien souvent ils sont honnêtes, mais peinent à prendre la tête du navire. Parviendront-ils à jouer la partition de passeurs d’espoir et de savoirs qui leur revient à présent ? Des dégénérés du numérique enfin, conscients qu’il ne reste que des miettes du frugal repas de leurs aïeux, révoltés devant la passivité de leurs pères et si loin encore des arcanes du pouvoir, jalousement gardées par les plus anciens, et leurs avatars… La peur au ventre, ils s’échappent du monde autant que faire se peut par le clan, le rire, et la lunette téléscopique de leurs écrans noirs… de monde ! Plus tard, Florence Noiville ne se met pas en scène, elle y monte – comme le Christ au calvaire ? -, nuance ! De nouveau cette impression de l’imminence d’une catastrophe. Pourquoi s’avance-t-elle comme on va à l’abattoir ? Sait-elle déjà qu’elle s’apprête à affronter, la voix chevrotante, un cheptel de « pauvres idiots, sombres con…damnés à ne jamais être hommes », comme dit la chanson – à l’eau – de Rose ? Rompus au brillant exercice oratoire, pour défendre leur chère et tendre société et sa paroisse branlante, ces détracteurs hardis se montrent prêts à guerroyer jusqu’au soir s’il le faut contre cette femme, leur condisciple, nue et démunie devant eux. Un résultat à la mesure de leur médiocre espérance : une dilution – à l’oreille des plus étourdis et des plus volatiles du moins – du courage de celle qui en appelle de ses vœux, certes à demi-mots, de peur qu’ils ne l’assomment, à une école et à un ordre et à un monde nouveau… C’est au matin du second jour, à quelques encablures seulement du bonheur au terme d’un récit de lumières, que Michel Authier abandonne tristement son auditoire ! Au détour d’une ultime question publique en effet, il souligne l’apparente constipation biblique d’un Dieu à qui il faudrait craindre de vouloir ressembler. Le risque semble de taille : se voir radier du barreau comme notre compère le serpent persifflant ! Or, que l’on soit serpent à gorge déployée, Jésus ou tout autre quidam, quoi de plus humain, de plus légitime et de plus beau pour un fils (ou de plus catholique si l’on veut) de vouloir ressembler à son père ? Sur la prestation d’Emmanuel Toniutti, je ne m’étendrai guère et pour une raison tout à fait singulière, tenant à mon choix – amusé – de quitter le navire – épuisé – au moment de son intervention, le temps d’une sieste salutaire avant le bouquet final… Le décalage horaire d’avec l’Inde, dont je m’en revenais à peine, étant alors sur le point d’avoir raison de mes paupières ! Je retiens néanmoins pour sa part qu’il sut donner la réplique sans démériter à Luc Ferry lors des échanges haletants entre l’ex-ministre devenu philosophe et l’ex-théologien devenu consultant ! De l’importance notamment de croire ou non en la résurrection pour un « bon » chrétien ou encore de cette soupe de Morale et de Cœur con-fondus pour « bon » dirigeant, et du juste dosage de chacun de ces vertueux ingrédients ! Mais, revenons-en à l’essentiel. C’est après nous avoir joliment chanté la bohème et conté l’histoire oubliée de notre pays, que Luc Ferry en appelle pour conclure à une politique emprunte d’Amour – le mot est lancé ! – reprenant en chœur et allègrement le petit traité des grandes vertus de son ami André Compte-Sponville : de celle qui n’en est pas encore, la politesse (dont la morale et l’éducation civique s’inspirent), à celle qui n’en est déjà plus une et qui transcende toutes les autres, l’Amour, décliné à l’envie : éros, philia et agapè… Lorsque les plus éminents observateurs, songeurs et autres analystes de notre temps effleurent du doigt tant de vérités assassines, puis tentent délicatement de les enfoncer dans nos têtes dures comme du bois par tous les artifices qui soient (ai-je dit orifices ? je n’oserais voyons !), lorsque l’on voit combien nous sommes démunis devant cette débâcle… Que faire ? Agir, donc ! Où aller ? Ne pas s’enfuir… Pourtant, avant de monter au créneau, de faire tout prêt et tout bas si possible toutes ces choses que nous pourrions faire – que nous devons faire dès à présent puisqu’il y a urgence ! – et que nous ne faisons pas… Prendre un dernier souffle d’air frais, celui de ceux qui font déjà, celui de ceux qui ne (se) trompent pas : des hommes et des femmes dans l’action, dans l’amour, qui agissent pour eux-mêmes, leurs proches, leurs enfants, mais aussi pour les autres et ceux des autres, tout simplement. Plongeons-nous ainsi et de nouveau dans le bain bouillonnant de cette université… Les yeux du père, ou de l’expert, Xavier Pommereau, parlant de ces ados, de nos ados, de tous les ados ou presque, qui traversent la scène une bouteille de Bordeaux ou de Gin (déchirés, comme dans le temps ?!) à la main, parce que leurs parents – nous donc ! – n’osent guère – et n’osons pas – les laisser goûter au doux parfum des roses et du vent… Non pas celui des chiottes, va s’en dire, mais bien celui des champs et de l’océan ! Lorsqu’Odon Vallet, pétri de modestie et emprunt de cette lucidité perçante acquise sur le terrain, martèle à deux reprises, de sa voix douce et monocorde, que dans trente ans, les Vietnamiens consentiront peut-être des bourses aux Français et non plus l’inverse, je ne crois ni à l’effet de manche ni au comique de répétition mais plutôt à sa volonté d’insister sur
Cher Sebastien, Bravo et merci pour ce commentaire talentueux: ton analyse de ce qui a été dit à l’Université est à la fois juste, profonde et un peu décalée, comme d’habitude, mais aussi, il me semble, un peu inquiète… inquiète des seniors, à la fois profiteurs: grands gagnants des fruits des 30 glorieuses au point d’avoir laissé un système économique (et une planète ?) à bout de souffle et victimes, lorsqu’on les jette de l’entreprise à 55 ou 57 ans, comme on jette l’appareil photo jetable… inquiète de la génération Y, en perte de repères… Puisque tu as fait référence à l’excellent Patrick Lemattre, c’est à des personnes comme toi, comme nous, de prendre le Pont d’Arcole ! et de réconcilier développement économique et respect de l’Homme. Vaste programme, que propose finalement un Philippe Dessertine que l’on dit pessimiste, mais que je juge réaliste, si l’on a la volonté et l’envie de faire entendre nos voix…celles, aussi, de Florence Noiville, de Stéphane Lévin, de Zahia Ziouani, de Michel Authier, d’Emmanuel Toniutti et de Luc Ferry. nous en reparlerons,maintenant que ton carrosse est prêt à reprendre la route de Saint-Aubin !! bien à toi Christophe