Le thème du bonheur au travail a fait une entrée remarquée dans les entreprises, en particulier en France, sous l’impulsion de leader comme Jean-François Zobrist, Laurence Vanhée, Alexandre Gerard, Isaac Getz, pour ne citer qu’eux…

Considéré par certains comme le miroir aux alouettes, vite caricaturé par les images de salons de massage ou distribution de fruits bio, il est pris très au sérieux par d’autres, qui y voient des avantages compétitifs pour l’entreprise en même temps qu’une augmentation de bien-être des salariés.

Ce rapport de réciprocité est pour moi essentiel : il ne s’agit pas seulement d’apporter plus de confort aux collaborateurs (même si dans certaines entreprises, cela ne serait pas du luxe), mais de considérer que l’apport de plus de bien-être, de plus d’autonomie pour les salariés, en faisant un travail en profondeur avec l’ensemble de l’entreprise, est en soi un accélérateur de performance.

Laurence Vanhée

Une des grandes spécialistes de la question en Europe, Laurence Vanhée, était avec nous à Bordeaux, ces 2 derniers jours, dans le cadre du cycle Valoriser le capital humain.

 

 

 

Cet article reprend la conférence de Laurence Vanhée, avec 3 parties :

  • Quelle influence le monde de demain a-t-il sur le bien-être au travail ?
  • Quels sont les bénéfices du bonheur au travail ?
  • L’expérience vécue de la transformation de la Sécurité Sociale en Belgique

 

Avant de réussir avec son Président l’extraordinaire mutation du Ministère de la Sécurité sociale belge, elle fut confrontée à un échec dans son emploi précédent, pour avoir vainement tentée de mettre en place une organisation basée sur plus de bien-être.

Vice-Présidente internationale en charge des ressources humaines d’un groupe de recherche pharmaceutique, en progression exponentielle (800 à 1400 salariés en 4 ans), elle tente de mettre en place des moyens permettant d’apporter du mieux-être dans sa société, convaincue que cela sera profitable à l’entreprise.

Las, ses tentatives se heurtent à un mur inébranlable : son chef n’est convaincu que par la loi du cash, du profit à court-terme (la société est cotée en Bourse) et ses tentatives l’épuisent au point de la rendre malade et de l’amener dans une situation de détresse morale et physique particulièrement alarmante.

C’est donc avec un grand intérêt que nous écoutons Laurence nous parler du bonheur au travail et du lien entre bonheur et performance.

1. L’influence du monde de demain

Laurence nous montre d’abord comment le monde de demain va influencer notre humanité et pourra impacter la notion de bonheur au travail.

Ce monde est fait :

  • De machines
  • De données
  • D’organisations
  • D’Hommes.
  • Un monde de machines

La science-fiction est en train de nous rattraper, les films d’anticipation comme Matrix sont en train de devenir notre réalité.

3 indicateurs :

  • Le test de Thuring est réussi dès lors que, mis en présence d’un robot, on est persuadé de discuter avec un humain.

C’est le cas depuis 2012.

  • Depuis 2015, les robots sont capables de changer leurs algorithmes par eux-mêmes.

Sophia, le robot anthropomorphe le plus avancé, maîtrise 25 langues, reconnaît 40 expressions différentes du visage de son interlocuteur, est capable de remplacer des infirmières.

 

  • 9% de Wikipédia est écrit par des writebots…

 

 

  • Un monde de données.

En 1992, il existait 1M d’ordinateurs

En 2016, 34 milliards d’objets sont connectés dans le monde…

Le big data va nous permettre de traiter la variété, le volume, la rapidité.

Les algorithmes sont plus performants que les humains pour le médical, le monde juridique…ils vont être lourdement impactés par ces innovations…

On prévoit la disparition des cartes bancaires en 2020, qui seront remplacées par un système de reconnaissance faciale…

45% de nos emplois auront disparus ou seront profondément modifiés en 2025…

 

  • Un monde d’organisations

Les technologies ne nous obligent plus à venir au bureau…

Sanofi a réalisé le plus gros bâtiment en environnement flexible avec 8 bureaux en moyenne pour 10 personnes

Pour mener ces changements, il faut des leaders inspirants :

Le leader inspirant est celui :

  1. Qui se connait bien
  2. Qui a du courage : il vient avec des idées disruptives
  3. Il a une vision holistique
  4. Il est capable d’inspirer son entourage

GE a arrêté son évaluation annuelle pour passer à une évaluation au fil de l’eau, collective

50% des gens pensent que l’évaluation individuelle ne sert à rien…

 

  • Un monde d’humains
  • On a envie de sens, de durabilité, de contact humain

Les Suédois ont voté une loi pour baisser les taxes et les impôts de ceux qui font réparer leurs objets

Des communautés engagées fleurissent partout

Pour Laurence Vanhée, ces 4 mondes sont connectés en permanence, de la même manière que la vie au travail et la vie privée sont de plus en plus en interférence.

C’est pourquoi nous avons besoin d’être heureux au travail ;

de passer d’un monde d’employment à un monde d’emplayment

 

2. les bénéfices du bonheur au travail

Cette partie s’appuie sur les travaux de recherche en psychologie positive de Martin Seligman :

  • Un salarié heureux est 2 fois moins malade
  • 40% de l’absentéisme est dû au désengagement
  • Le coût additionnel de quelqu’un qui démissionne, c’est 45% de coût supplémentaire, (en temps perdu dans l’entreprise à en parler,…)
  • Un salarié heureux est 55% plus créatif (on a corrélé les agendas des personnes heureuses au travail avec ceux qui ne l’étaient pas)

Malgré cela, on s’intéresse peu à la question du bonheur au travail…

Comment mesurer le succès d’une organisation ? la vraie mesure du succès, c’est le bonheur.

Au-delà d’un certain niveau de salaire, il est prouvé que les augmentations, les primes et bonus ne contribuent pas à rendre les gens heureux, en tous cas sur le long terme.

La « durée de vie » d’un bonus en terme de bonheur, c’est 6 semaines.

 

Ce qui va influencer le bonheur au travail :

La vision commune

La confiance et cultiver la confiance en soi

Un job qui fait du sens

La liberté et l’autonomie

Avoir des réalisations personnelles et recevoir du feed-back

Pouvoir mesurer ses progrès

Se sentir responsable

Travailler en équipe

Etre connecté

 

Le bonheur au travail, c’est le point commun entre :

  • Ce que je fais bien ;
  • Ce que j’aime faire
  • Ce qui est utile à l’organisation

La démarche de bonheur au travail peut se résumer à 6 piliers :

  • l’autonomie
  • Pouvoir se connecter les uns aux autres
  • Pouvoir contribuer : expertise, savoir-faire,…
  • Avoir des résultats
  • Avoir une mission : voir plus loin que des résultats
  • La confiance en soi

 

3. L’expérience vécue de la transformation de la Sécurité Sociale belge

A son arrivée, le Ministère de la Sécurité sociale belge n’est pas, à proprement parlé, une entreprise attractive et performante :

  • Le taux d’absentéisme est particulièrement élevé ;
  • Les délais de traitement des dossiers des citoyens également ;
  • Le sentiment de fierté au travail est particulièrement faible ;
  • Il n’y a aucune candidature spontanée…
  • Plus grave : 40% des agents doivent partir à la retraite entre 2005 et 2015…

Il est donc urgent d’agir !…

2 grandes règles sont mises en place :

  • Pour cultiver le bonheur, il faut proposer de la liberté : chacun pioche les éléments dont il a besoin ;
  • Ma liberté s’arrête là où commence celle des autres

Avec une logique de co-construction, 187 volontaires travaillent sur les sujets proposés.

Les cadres ont chacun des évaluations à 360°, dont ils sont les seuls destinataires des résultats.

Les nouvelles propositions doivent obligatoirement passer au tamis du KISSS :

Keep it Straight and Simple and Sustainable.

Parmi les changements opérés :

  • Les agents sont passés de 1 à 3 jours de télétravail par semaine : chacun peut décider quand, comment et où il veut travailler, ce qui permis de louer des surfaces de bureaux beaucoup moins grandes et de passer de 7 bureaux pour 10 agents en moyenne (et de réaliser des économies)
  • Transformation des bureaux : tout le personnel a été réuni sur un seul site, décoré et agencé à partir des suggestions énoncées ; on travaille où on a envie : dans tel espace pour se réunir, tel autre pour téléphoner, pour travailler sur ordinateur…

 

  • Les objectifs sont fixés et évalués collectivement
  • Les chefs sont devenus des leaders, chargés de faciliter les choses
  • On mesure la qualité, la quantité de travail et l’attitude
  • Les valeurs ne sont pas décrétées, elles sont co-construites

 

Les résultats sont impressionnants :

  • Une économie de 12M€/an : moins de loyer, de reprographie, de jours de maladie,…
  • Productivité en hausse de 20%
  • 39% de manager femmes
  • + 500% de candidatures spontanés
  • Baisse de 26% de l’absentéisme

 

Qualités constatées pour y arriver :

Du courage, de la sincérité, de l’humilité, de la générosité, de la proximité.

Dans nos 2 groupes de Bordeaux, le sujet ne laisse pas indifférent ! Même si aucune organisation présente n’a mis en place cette démarche, chacun espère bien aller dans cette direction.

Nous sommes en tous cas tous convaincus de l’intérêt de ce travail, dès lors qu’il est fait avec sincérité et courage.

Envie d’en savoir plus sur le bonheur au travail et de rencontrer Laurence Vanhée ?

Rendez-vous au Parlement des Entrepreneurs d’avenir à Bordeaux, les 8 et 9 décembre 2016:

http://www.entrepreneursdavenir.com/pea/page/-/code/parlement.2016.presentation

Pour aller plus loin, extraits de la conférence de Laurence Vanhée lors de la 21ème Université Hommes-Entreprises du CECA:

crédit photos: Ch de La Chaise/spectacle école St Gabriel

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